Les racines du FN
Article paru dans l'édition du 6 octobre 1997.
« Ils ont voté et puis après ? », chantait Léo Ferré. Oui, le conseil municipal de Vitrolles, à majorité Front national, a voté vendredi soir pour le changement du nom de la ville et pour débaptiser huit noms de rues et places. Pour, disent-ils, « réenraciner la ville dans son identité provençale et ses valeurs universelles », les élus vitrollais devaient « prendre des mesures d’urgence ».
Proposer « Vitrolles-en-Provence ». Et puis surtout, laver les rues de certains noms indignes, ceux de Mandela (sans commentaire), de Mitterrand, de Tjibaou (cet « agitateur et terroriste, coupable d’avoir assassiné des gendarmes français à la machette ») ou encore de Dulcie September (la militante de l’ANC assassinée en France et qualifiée d’« agitatrice africaine »). « Retrouver de vraies racines », affirment-ils. La place de Provence efface donc la place Nelson-Mandela. Le square Marguerite-de-Provence élimine le square Dulcie-September. L’avenue Jean-Pierre-Stirbois (ex-numéro deux du FN) raye l’avenue Jean-Marie Tjibaou.
Les Mégret, Catherine et l’autre, n’ont d’ailleurs pas assisté aux débats - ouverts il est vrai, à la demande de l’ancien maire socialiste Jean-Jacques Anglade, par une minute de silence en mémoire des victimes de l’Holocauste. « Vous voulez tirer un trait sur l’Histoire et effacer les mémoires pour mieux revenir sur votre idéologie, votre nostalgie de l’apartheid et du colonialisme », s’est indigné Henri Agarrat, élu communiste. La décision de transformer le nom de la ville, elle, devra être entérinée par le ministère de l’Intérieur après avis du conseil général des Bouches-du-Rhône et du Conseil d’Etat. L’Etat c’est la République. Et le FN attaque la République.