Des doléances au Parlement
Organisé par le collectif "AC Le Feu", un rassemblement a porté à l'Assemblée et au Sénat les doléances de dizaines de milliers d'habitants.
Un an après les violences urbaines de l'automne 2005, quelques centaines de jeunes et militants associatifs issus pour la plupart des quartiers dits "sensibles" ont défilé mercredi 25 octobre à Paris pour porter à l'Assemblée nationale et au Sénat les critiques et les attentes de quelque 20.000 citoyens, recueillies au cours d'un tournée dans 120 villes ces dix derniers mois.
"Le plus grand parti politique, c'est le peuple", pouvait-on lire sur une banderole en tête du cortège, tandis qu'une autre proclamait: "Pour une politique choisie et non subie. Voter, c'est exister", dernier thème décliné en jaune sur des T-shirts noir distribués durant le défilé.
Ces deux slogans rappelaient les deux angles d'action du collectif AC Le Feu (Association, Collectif, Liberté, Egalité, Fraternité, Ensemble, Unis) créé en décembre 2005 par deux militants associatifs à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), d'où étaient parties les violences de l'année dernière au soir du 27 octobre, suite au décès de deux adolescents électrocutés après s'être réfugiés dans un transformateur alors qu'ils étaient poursuivis par des policiers.
"Traduire la souffrance"
"Ce qui s'est passé l'année dernière, c'était un cri d'alarme, le témoignage d'une souffrance. Cette souffrance, on a voulu la traduire en rendant la parole aux citoyens par les cahiers de doléances, et en les incitant à aller s'inscrire sur les listes électorales", a expliqué Mohamed Mechmache, porte-parole et co-fondateur du collectif à l'origine de la marche, avec Samir Mihi.
"On apporte aujourd'hui au monde politique des choses, des outils qui émanent de la voix de la population, pas des sondages. Aux politiques d'en faire quelque chose", a-t-il ajouté. Quant à la faible mobilisation, "ce n'est pas grave", a-t-il estimé. "L'important, c'est la conviction".
Le cahier de doléances, qui rappellent la révolution française , réalisés par le collectif AC le feu mérite le détour. Le texte est certes un peu long, mais les propistions sont nombreuses, face à un problème complexe.
Elles sont une réponse venant des quartiers aux problèmes des cités. Je ne suis pas forcément d'accord avec tout, mais les réflexions sont toujours pertinentes et doivent interpeller tous les responsables politiques.
Bonne lecture.
Notre collectif ACLEFEU (Association Collectif Liberté, Egalité, Fraternité, Ensemble, Unis) a vu le jour au lendemain des révoltes sociales qui ont secoué le pays au mois de Novembre 2005, suite à la mort de deux de nos enfants, Bouna et Zyad, à Clichy sous bois. Pour que l’on puisse dire qu’ils ne sont pas morts pour rien, nous nous sommes fixés pour mission d’aller à la rencontre de la population dans toute sa diversité et de faire remplir aux gens des cahiers de doléances. Il s’agissait d’établir un rapport sous forme d’état des lieux et de propositions, que nous vous remettons aujourd’hui.
A l’instar des sans culotes de la révolution française de 1789, notre démarche vise à faire remonter l’expression populaire auprès des édiles de la nation. L’histoire semble se répéter ; aujourd’hui comme hier, la notion centrale de la Révolution, est clairement perceptible dans ces cahiers : l’Égalité. Force est de constater que les semblants de tentatives successives de réduction des inégalités des différents gouvernements ont échoué, se heurtant tous au mur des privilèges. Comme par le passé, les crises se conjuguent : agricole, industrielle, commerciale, sociale… Elles ne font qu’accentuer l’inégalité entre les quelques privilégiés et les autres Tandis que les riches peuvent se permettre de spéculer et de s’enrichir encore, un nombre croissant de personnes défavorisées n’a plus que le recours aux œuvres caritatives pour subsister. Il nous a donc semblé indispensable d’agir pour le cessez le feu, attendu que les meilleures armes pour se faire entendre restent encore la participation citoyenne à notre démocratie et que, le débat qui devrait nourrir le choix lors du scrutin, reste circonscrit à une partie de la société, celle qui s’en sort. Tous les citoyens devaient vraiment pouvoir prendre la parole et exprimer leurs besoins, leurs propositions, leurs espoirs. Nous avons sillonné le pays à bord de 2 bus affrétés pour l’occasion, posé nos tréteaux dans 120 villes de France et recueillies ainsi plus de 20 000 constats, doléances et plus encore de propositions. Les libres contributions ont porté sur le logement et le cadre de vie, l’emploi et la précarité, l’éducation et la petite enfance, la justice et les pratiques policières, la citoyenneté, le vote des immigrés et la politique, la situation des femmes, les questions intergénérationnelles et la communication, l’insécurité et l’environnement, la répartition des richesses et les inégalités, la santé et le handicap, les discriminations et l’exclusion, le transport et l’isolement, la culture, les religions, les loisirs.
Nous nous sommes ensuite attachés à adopter une méthodologie permettant de traiter quantitativement et qualitativement, l’ensemble des témoignages collectés. Celle-ci met en exergue le nombre, l’âge, le lieu de résidence et les thèmes dominants. Dans cette synthèse, les thèmes seront abordés dans l’ordre des priorités telles qu’elles ont été exprimées. A ce jour, nous avons analysé près de 13 000 de ces contributions – le plus grand sondage qualitatif jamais réalisé ! - en tête desquelles arrivent dans l’ordre les revendications sur l’emploi, l’arrêt des discriminations et de l’exclusion, le logement, une justice équitable et le contrôle des pratiques policières, l’éducation et l’orientation. Loin de se désintéresser de la politique, nombre de ces personnes parmi lesquelles, une majorité âgée de 18 à 25 ans, ont exprimé l’exigence de voir les partis et leurs élus, être plus proches des habitants et des réalités.
Depuis plusieurs années, tous les partis multiplient les forums, états généraux etc. Mais toute cette bonne volonté ne semble pas avoir convaincu les classes populaires. L’abstention aux récentes élections ainsi que nos cahiers de doléances en sont la preuve. Nous espérons que ceux qui briguent à présider aux destinées de la France sauront tirer parti de ce que nous leur offrons ici, pour construire avec les habitants, en respectant leurs propositions, une politique juste et courageuse qui s’attaquerait en priorités aux causes de la précarité et de l’exclusion aux formules usuelles de politesse, des coups et bousculades .
Malheureusement trop fréquentes Les plus âgés le dénoncent également en masse, et dans les cahiers, nombreux sont les témoignages de violence contre des mères accompagnées de jeunes enfants ou contre des travails leurs qui rentrent tard et ne « zonent » pas de nuit. Le sentiment concernant la police est que ses missions n’ont plus rien à voir avec l’ordre public et la protection de la population, mais bien avec le contrôle social ou le contrôle racial.
Les principales propositions des cahiers de doléances. · Les violences policières et les insultes doivent être réprimées, ce qui implique pour commencer de prendre en considération les plaintes des victimes. · La police devrait être exemplaire. En cas de bavure, les sanctions doivent être extrêmement lourdes. · Les gardes à vue, moments de tous les abus, doivent être intégralement filmées. · Distinction des corps d’exécution (police) et d’inspection (IGS et IGPN), pour que le corps d’inspection soit désolidarisé des policiers et indépendant, notamment par la création d’une autorité supérieure comportant des représentants de citoyens. · Favoriser la transformation de la police vers plus de représentativité de la diversité française. · Meilleure formation des fonctionnaires de police. · Rétablissement de la police de proximité, et de cadres de dialogue local. · Développement d’un discours fort affirmant que «l’uniforme» de banlieue (baskets, casquettes, survêtements) ne désigne pas nécessairement des délinquants. · Meilleure répartition géographique des policiers expérimentés (à ne pas confondre avec gradés). • Faire évoluer la Commission Nationale de Déontologie et de Sécurité pour une saisine plus facile et pour qu’elle intègre des citoyens.
Au travers des cahiers de doléances, les critiques contre l’école sont nombreuses. Toutes en fait se résument au sentiment que l’école au mieux ne brise pas ou plus les prédestinations sociales, au pire qu’elle contribue à les renforcer. Au banc des accusés, on retrouve d’abord les politiques d’orientation précoce qui imposent des choix définitifs que l’on regrette ensuite, souvent pour évacuer au plus vite les élèves en difficulté, et le manque d’information sur l’orientation y compris à l’université ; le manque criant de moyens de l’Éducation Nationale ; le manque de lien entre les formations et le monde du travail à l’université ; le mensonge de la méritocratie qui ne permet pas aux meilleurs des collèges et lycées dits sensibles de vraiment s’en sortir ; les effectifs trop importants dans les classes ; l’absence d’accompagnement individuel des élèves en difficulté ou qui ne peuvent trouver d’aide chez eux ; la faiblesse des bourses, dans le secondaire et le supérieur, qui sont très loin de couvrir tous les frais, et dont les plafonds de revenus sont scandaleusement bas, sans rapport avec la réalité économique ; le coût des études, en particuliers des frais d’inscription à la fac et plus encore dans les écoles de commerce et les grandes écoles ; les ZEP, dont la plupart appellent à la Culture.
L’école n’est pas le seul lieu d’acquisition du savoir. Les territoires ne sont pas égaux en matière d’équipements culturels : l’accès au théâtre, au cinéma d’art et d’essai, aux bibliothèques et médiathèques, aux musées est bien plus facile dans les quartiers aisés que dans les quartiers populaires. Propositions : · Développer les équipements culturels dans les quartiers populaires, sans faire des choix soit disant adaptés à la population : les enfants des quartiers populaires doivent accéder à la « grande » culture autant que les autres, ils n’ont pas besoin qu’on sélectionne pour eux, de manière paternaliste, ce qui leur convient. · Valoriser dans les programmations des grandes institutions culturelle françaises (Comédie Françaises, BNF, Musées …) les arts et la culture de tous les pays et tous les peuples, notamment ceux qui ont fournis de nombreux migrants en France. Suppression au profit d’établissements de bon niveau pour tous et toutes, tant l’étiquète ZEP.
De notre coté, nous avons fidèlement synthétisé les priorités, constats et propositions des cahiers de doléances. Dans les mois qui viennent, nous serons vigilants quant à l’usage que vous ferez de ces propositions populaires. Nous entendons peser de tout notre poids pour que les exclus s’inscrivent massivement sur les listes électorales et choisissent leur candidat en fonction de sa capacité à construire une politique en concertation avec les citoyens.
1. Emploi
Dans notre société, qui n’a pas d’emploi est considéré comme pire que rien, comme un parasite vivant de l’aide sociale et de la solidarité nationale. Les cahiers de doléance sont remplis d’appels à l’aide déchirants, de milliers de personnes qui ne veulent que travailler. Mais l’on ne travaille pas à n’importe quel prix. Les qualifications doivent être reconnues, les salaires doivent être motivants, et surtout, surtout, l’emploi doit permettre de sortir de la précarité. Les gens ont besoin de se projeter, de s’installer, dans tous les sens du terme, dans la vie. Il faut donc des CDI, ceci revient dans presque chaque cahier de doléances.
Leur lecture montre que la précarité à laquelle sont réduits beaucoup de travailleurs est d’autant plus insupportable que de nombreuses entreprises réalisent des bénéfices record. Les jeunes dénoncent le système pervers qui consiste à leur demander de l’expérience qu’on ne leur donne jamais l’occasion d’acquérir ; les discriminations raciales, d’autant plus que les personnes poussé leurs études ; l’inadéquation de nombreux diplômes au marché du travail ; la difficulté à trouver des stages, qui trop souvent sont non rémunérés ou presque, alors qu’un travail est fourni, ou bien parfaitement inutiles …
Après la mobilisation contre le CPE, que nombre d’entre eux évoquent, ils insistent sur le besoin de contrats stables. Le leitmotiv, c’est le sentiment que la France ne laisse pas sa chance à sa jeunesse. La faiblesse des salaires au regard notamment du prix des logements est souvent dénoncée, ainsi que le manque cruel d’emploi faiblement qualifié pour tous ceux qui n’ont pas réussi leurs études. À ce niveau de qualification, la faible différence de revenu entre le SMIC et le RMI est dénoncée comme très démotivante. Ceux qui ont du travail dénoncent les licenciements abusifs, la faiblesse du salarié face au patron, en terme de droit du travail, et tout le monde est choqué par les délocalisations. L’emploi, la principale préoccupation exprimée dans 2586 contributions Les principales propositions des cahiers de doléances. · Une loi qui crée un quota minimum de salariés de moins de 25 ans dans les entreprises. · Hausse du SMIC et des salaires. Redistribution des bénéfices en salaires, primes ou actions. · Une Allocation d’Autonomie pour les jeunes de 18 à 25 ans en formation ou en insertion. · Lutter contre les contrats précaires, et en particulier arrêter de proposer des solutions précaires aux situations précaires.
Développer le CDI, seul contrat sécurisant pour les classes populaires qui permet, de se projeter dans l’avenir (crédits, logement etc.). · Contrôle de l’égalité des salaires entre hommes et femmes. · Formation obligatoire et aux frais des entreprises au droit du travail. Création massive de postes d’inspecteurs du Travail, pour assurer cette mission et renforcer celle de contrôle des entreprises. Lute contre les licenciements abusifs. Faire participer les salariés à la gestion des entreprises ou leur donner de véritables moyens de contrôle. Lutte contre les délocalisations et remboursement des aides reçues par les entreprises. Accompagnement des personnes fragiles, refonte et développement de la validation des acquis de l'expérience et de la formation continue.
Renforcer les services publics d’aide à l’emploi et à l’insertion professionnelle et aide massive aux associations chargées d’insertion Pour la jeunesse, création d’une banque• nationale d’aide à la création d’entreprise par des jeunes. · Rétablissement des emplois jeunes, qui doivent être qualifiants et dont le recrutement doit être mieux étalés en terme de qualification initiale (recruter certains avant le bac, pour certains postes) · Plus de place en BTS et en IUT. Ceux qui souhaitent des études courtes et professionnalisant, ou qui n’ont pas les moyens de faire des études longues ne doivent pas aller à la fac au seul motif qu’ils et elles n’ont pas eu de place dans les filières courtes. Il faut aussi une meilleure couverture géographique des filières en BTS et en IUT. · Pour développer l’expérience, il faut encourager les stages, mais ils doivent être utiles et correctement rémunérés. Les entreprises ne devraient pourtant pas avoir plus d’un certain taux de stagiaires. · Le permis de conduire, indispensable dans de nombreux emplois, coûte beaucoup trop cher ! Il faut que l’apprentissage de la conduite soit assuré dans le cadre scolaire.
Les syndicats de salariés doivent aussi comprendre qu’une génération est en train d’être sacrifiée, ceux qui n’ont jamais travaillé ou alors très peu et dans des conditions très précaires, et qu’ils doivent aussi se mobiliser pour cette jeunesse populaire.
2. Discriminations racistes
Trop, trop, trop de discriminations racistes ! Les cahiers de doléances sont dramatiquement clairs sur cette question : plus de la moitié des cahiers l’évoquent, et une partie substantielle des personnes qui les dénoncent le font manifestement, par solidarité, en parlant de l’expérience vécue par des amis par exemple. La discrimination n’est pas la seule affaire des noirs et des arabes, au contraire, une prise de conscience généralisée s’est faite, dans la jeunesse, mais aussi bien au -delà.
Ceux qui évoquent la discrimination qu’ils ont eux -mêmes subie décrivent un véritable enfermement dans la précarité, en matière d’emploi ou de logement, une discrimination quotidienne et permanente, qui brise, pour ceux qui ont de 15 à 35 ans, tout espoir de s’en sortir, malgré les efforts et les diplômes universitaires.
De nombreuses personnes rapportent leurs expériences vexatoires, en matière pour dire qui le poste ne sera pas donné, sentiment pour les hauts diplômés d’être à l’écart et bloqués dans leur progression mis Une illustration de la déclinaison territoriale de la discrimination raciste. D’autres évoquent l’impossibilité de s’émanciper de ses parents qui en découle, soit en ne trouvant pas de travail soit en n’ayant pas accès au logement ni public ni privé (pour les célibataires). Dénoncées dans les cahiers lorsqu’elles frappent dans le Les discriminations sont également domaine des loisirs.
Au final, les cahiers de doléances dessinent l’image d’une France complètement gangrenée par ces discriminations. C’est certainement pour la jeunesse le premier enjeu politique dans la période électorale qui s’ouvre. La discrimination positive et le CV anonymes ont suscité des avis partagés : la plupart les dénoncent, mais certains les proposent, en désespoir de cause, comme La discrimination : Nombre de doléances qui évoquent les discriminations 7 par classes d’âges. U n phénomène principalement dénoncé par les jeunes âgés de 18 à 25 ans. Ultime moyen d’accéder à l’emploi. Les principales propositions des cahiers de doléances. · Il faut qu’en matière de discrimination soient prononcées des peines très lourdes, qui fassent peur aux bailleurs ou aux employeurs, fondées sur le constat que la discrimination brise la vie des personnes. Il faut que les plaintes soient prises en compte, que les parquets poursuivent, et que les juges condamnent réellement. Qu’enfin la loi soit appliquée et qu’enfin la justice protège les victimes. · Il faut garantir l’égal accès aux services publics, ce qui implique des établissements scolaires de bon niveau et en bon état, des policiers à l’écoute de la population et prêts à lui venir en aide, des missions locales, centres de sécu etc. … dans les quartiers défavorisés, avec des personnels aussi polis et motivés et expérimentés qu’ailleurs … · Les diplômes étrangers doivent être reconnus à fonction égale, salaire égal. Par ailleurs, trop de cadres, d’entrepreneurs ou de professeurs étrangers sont contraints de travailler dans le bâtiment ! ·
Lancement d’une grande campagne médiatique de dénonciation et de sensibilisation contre les discriminations avec les méthodes et les moyens de la sécurité routière (médiatiques et recherche d’impact) · Politique d’aide à l’intégration (pour les primo arrivants, pas pour des français !). · Développement à l’école d’apprentissages valorisant les différentes cultures, notamment au travers de l’art, de la littérature et de l’histoire. Les auteurs maghrébins et Africains devraient faire partie des programmes de Français, par exemple. · Augmenter et pérenniser les moyens des associations d’éducation et de lute contre le racisme et les discriminations. · Les média doivent faire un gros effort. Luter contre les discriminations implique un changement des mentalités, et en particulier de l’image inquiétante des jeunes de banlieues qu’ils diffusent. · Enseigner une Histoire partagée et plus juste (sur la colonisation et les traites).
3. Logement & cadre de vie
Ce n’est pas une surprise, les problèmes de logement font partie de ceux les plus souvent évoqués, qu’il s’agisse de la difficulté à trouver un logement, de l’état de délabrement des logements sociaux et de certaines copropriétés (insalubrité), y compris les parties communes (ascenseurs dangereux), et espaces des général du coût , ou l’inadaptation extérieurs, les du logements de problème prohibitif des logements, de la lourdeur des charges, ou encore de tout cela à la fois. Mais les doléances évoque nt aussi avec insistance le manque de mixité sociale et raciale des grands ensembles, le non -respect de la loi SRU (« Solidarité et Renouvèlement Urbain » : les 20% de logements sociaux par commune), le calcul de l’APL hors charges, et sur des salaires touchés plus d’un an auparavant, le problème spécifique du logement des jeunes et des étudiants, avec en particulier des chambres de cité universitaire minuscules et dans un état déplorables, le logement des immigrés récents, clandestins ou non, par des marchands de sommeil …
Le logement des jeunes est un problème qui revient avec insistance dans les cahiers : ceux -ci ne réussissent pas, même après 25 ans, à partir de chez leurs parents. Environnement Lorsque les cahiers évoquent la question de l’environnement c’est pour faire allusion aux dangers multiples et angoissants qui menacent notre planète. Le réchauffement climatique, la pénurie, le partage et la qualité de l’eau, la … pollution Les personnes sont plus directement préoccupées par les problèmes de nuisances sonores, de sécurité alimentaire, la qualité de l’air en zone urbaine. Propositions : · Pénalisation des entreprises polluantes. · Favoriser les produits biodégradables et / ou recyclables. · Education à l’environnement et aux comportements qui limitent les nuisances à autrui (bruit, déchets …). · Favoriser la recherche et la mise en œuvre des énergies alternatives énergies fossiles et au nucléaire. Les conditions de vie (environnement, délabrement, hauteur des immeubles et distance entre eux, squat des halls par des jeunes qui n’ont aucun autre lieu …) et l’hygiène (détritus …) dans les cités ou les cités Universitaires sont très souvent dénoncées.
Il en est de même, pour les grandes cités, du manque de commerce de proximité et de service public. Les problèmes de voisinages, produits de la précarité, de la mauvaise insonorisation et du délabrement de l’habitât sont régulièrement évoqués. Le manque de logement, alors que de très nombreux logements privés ou publics sont vi des est dénoncé avec insistance. L’existence de famille et de travailleurs salariés et pourtant sans abris revient dans les cahiers comme le summum de l’injustice. Les principales propositions des cahiers de doléances. § Création d’un droit constitutionnel au logement. § Définition d’un « plan Marshall » pour le logement. § Respect des obligations de la Loi SRU , sans dérogation : suspension ou inéligibilité des maires récalcitrants. § Dispersion des HLM dans la vile (fin des grandes cités, des grandes tours ou grandes barres colées les unes aux autres). § Décloisonner les grands ensembles, faciliter les accès aux centres -viles. § Mise en place d’une politique de mixité sociale. § Développer les commerces de proximité et répartir les services publics et culturels dans toute la vile. § Droit spécifique favorisant l’accès au logement Revalorisation de l’APL et mise en œuvre d’un par les jeunes. § Loi d’encadrement des loyers privés et des conditions d’attribution. · Limitation des hausses de loyers en fonction de ratio raisonnable entre loyers et salaires. · Création d’une caisse nationale d’assurance sociale pour les cautions. · Constructions de nouveaux logements sociaux (en HLM), de toutes les taillés, dans des petites unités d e logement, avant de procéder à des destructions. · Réquisition des logements et bureaux vides. · Allocation d’Autonomie pour les jeunes en formation ou en insertion qui leur permette de s’installer seul ou en couple. · Des efforts en matière d’environnement et de cadre de vie dans les réhabilitations ou les nouvelles constructions de logements sociaux. · Création d’emplois pour l’entretien des cités par des je unes de la cité. · Créer des cadres de concertation bailleurs sociaux et habitants. · Contrôle du rapport entre les charges et le loyer, et contrôle sur les syndics, au travers d’une commission départementale du logement qui associe pouvoirs publics, bailleurs privés et locataires. · Condamnations judiciaires des marchands de sommeil. · Accompagnement des locataires en difficulté pour payer les loyers.
4. Justice
En ce domaine, il faut que la France et ses élites se rendent compte du niveau de crise atteint. Les cahiers de doléance s sont l’expression d’une criante et désespérée demande de justice. Toutes les faillites de l’institution judiciaire sont dénoncées, et en particulier l’inégalité économique qui frappe les classes populaires comme une quintuple peine : la qualité de la défense et l’issue du procès dépend largement des honoraires que Prisons Les cahiers de doléances font état des conditions honteuses de détention dans les prisons françaises, ce qui est de notoriété publique depuis de nombreuses années sans que l’on ne fasse rien, notamment à cause de la surpopulation carcérale Les détenus, quoi, qu’ils aient fait, sont des humains et si la présomption d'innocence s’applique à tous, alors comment accepter que la majorité des détenus soient en préventive, dans de telles conditions de surcroît.
Les doléances pointent également l’abandon des politiques de formation et de préparation à la réinsertion, l’essentiel des programmes ayant été fermés. Enfin, et surtout, les cahiers insistent sur la primauté de la prévention sur la répression en matière de délinquance, en particulier pour les mineurs, et sur les facteurs économiques et sociaux. Voir les thèmes inégalités, logement, emploi, éducation, police. Propositions : · Privilégier la prévention et les alternatives à l’incarcération. · Développer le travail de réinsertion dans les prisons et les formations diplômantes ou qualifiantes. · Payer décemment le travail des prisonniers. · Définir une vraie politique de libération conditionnelle. · Développer les parloirs familiaux, garantir l’intimité et un environnement adapté aux enfants pendant les visites. · Arrêter de répondre par l’incarcération à la maladie mentale. Ces personnes ont besoin de soins en hôpital psychiatrique. · Mettre fin à la politique de ghettoïsation ethnique dans les prisons. , · Création de postes d’éducateurs notamment spécialisés dans l’insertion professionnelle, de psychologues, de médecins, dans les prisons. l’on peut payer à son avocat, les magistrats méprisent et traitent de façon paternaliste ces mêmes personnes, dont les affaires sont déjà considérées comme mineures par les policiers dès l’enregistrement de la plainte, les personnes issues des classes populaires souffrent parfois violemment de la lenteur d’une procédure dont leur avenir dépend.
Les jeunes se voient souvent appliquer les principes d’une « tolérance zéro » qui ne leur laisse jamais de seconde chance, qui les marquent à vie comme délinquant même s’il ne s’agissait que de bêtise d’adolescence, quand ceux qui sont coupables d’abus de bien sociaux ou publics portant sur des sommes faramineuses, sont à peine inquiétés, retrouvent un poste de PDG ailleurs ou reprennent leur carrière politique quelques années plus tard, si d’aventure ils ont été condamnés … La justice ne condamne pas la discrimination raciale, pourtant fléau endémique, ou alors difficilement, et à des peines ridicules. La discrimination brise la vie de milliers de personne s, les prive d’avenir et d’espoir. Les cahiers de doléances montrent que l’essentiel des personnes ne croient pas à la possibilité de se voir rendre justice sur cette question.
Ainsi, c’est le sentiment d’avoir à faire à une justice de classe et de « race » qui se dessine. L’interprétation revient comme un leitmotiv au fil des cahiers : une justice plus juste ! Les principales propositions des cahiers de doléances. · Promotion de la diversité des origines (sociale, culturelle et ethnique) dans le recrutement des magistrats et des autres membres du tribunal, par exemple sur le modèle de l’IEP de Paris. Réformer le recrutement pour que les magistrats soient moins coupés de la réalité qu’ils ont à juger. (Suppression de la limite d’âge …) · Accélération du traitement des affaires par les tribunaux. · Gratuité de la justice, refonte du système des honoraires des avocats. · Application des lois à tous, sans privilèges de position, de richesse …
5. Pratiques Policières Insécurité
Les cahiers de doléances parlent très peu de l’insécurité, contrairement à ce que les médias nous rapportent quotidiennement. Les Classes populaires, qui subissent le plus l’insécurité n’en font pourtant pas une priorité, au regard des questions cruciales pour leur avenir comme l’emploi, l’éducation, les discriminations.
L’insécurité … au quotidien, telle que nous la raconte les cahiers, ce sont avant tout des gamins turbulents, capables de vandalisme qui s’ajoute aux difficultés du quotidien (bris de vitre des voitures pour voler une bricole, abribus …), violents dans leurs rapports entre eux et aux autres, certainement très malappris et insolents, mais pas la « racaille extrêmement violente et sauvage » dont ont peur ceux qui ne la voient qu’au travers des médias. Contrairement au discours officiel, les personnes qui ont rempli les cahiers fustigent la tranquillité dans laquelle les trafiquants en tout genre « exercent leur métier », au vu et su de tous, et de la police.
S’attaquer aux trafics sans soupçonner l’ensemble de la population d’un quartier, c’est bien à cela que doit servir un travail d’enquête sérieux. Propositions : · Instaurer un délit ou un crime spécifique : « entraînement de mineur dans la délinquance » ou dans la criminalité (visant ceux qui payent des mineurs pour faire les guetteurs, passeurs etc. .). · Lutter contre les réseaux parallèles, en visant vraiment les têtes, sans considérer que tout le quartier est forcément complice. · Traiter la délinquance comme un effet du regroupement des défavorisés et donc d e larges populations de je unes, oisifs, en rupture scolaire et hors projet d’insertion : c’est la question des grands ensembles, et celle de l’échec scolaire qui peuvent seules réduire les comportements délictueux. · Défendre la mission avant tout éducative du tribunal pour enfant, et maintenir le principe de l’incarcération en dernier recours. · Créer massivement des postes d’éducateurs spécialisés et d’animateurs.
Les cahiers de doléances sont loin de revendiquer la suppression de la police ou de se muer en appels aux armes ou à la justice privée, comme le voudrait l’imaginaire d’une population globalement délinquante que certains diffusent. Les manières de la police sont malgré tout particulièrement dénoncées, et il est important de ne pas balayer cela d’un revers de main : ce sont autant les files que les garçons, chez les jeunes, qui décrivent des contrôles incessants de la part de policiers qui en outre les connaissent déjà personnellement, des insultes comme substitut aux formules usuelles de politesse, des coups et bousculades . Malheureusement trop fréquentes
Les plus âgés le dénoncent également en masse, et dans les cahiers, nombreux sont les témoignages de violence contre des mères accompagnées de jeunes enfants ou contre des travailleurs qui rentrent tard et ne « zonent » pas de nuit. Le sentiment concernant la police est que ses missions n’ont plus rien à voir avec l’ordre public et la protection de la population, mais bien avec le contrôle social ou le contrôle racial. Les principales propositions des cahiers de doléances. · Les violences policières et les insultes doivent être réprimées, ce qui implique pour commencer de prendre en considération les plaintes des victimes. · La police devrait être exemplaire. En cas de bavure, les sanctions doivent être extrêmement lourdes. · Les gardes à vue, moments de tous les abus, doivent être intégralement filmées. · Distinction des corps d’exécution (police) et d’inspection (IGS et IGPN), pour que le corps d’inspection soit désolidarisé des policiers et indépendant, notamment par la création d’une autorité supérieure comportant des représentants de citoyens. · Favoriser la transformation de la police vers plus de représentativité de la diversité française. · Meilleure formation des fonctionnaires de police. · Rétablissement de la police de proximité, et de cadres de dialogue local. · Développement d’un discours fort affirmant que «l’uniforme» de banlieue (baskets, casquettes, survêtements) ne désigne pas nécessairement des délinquants. · Meilleure répartition géographique des policiers expérimentés (à ne pas confondre avec gradés). • Faire évoluer la Commission Nationale de Déontologie et de Sécurité pour une saisine plus facile et pour qu’elle intègre des citoyens.