A l’heure où une partie du PS est tentée par la sociale démocratie et le rapprochement avec le centre pour faire un grand parti démocrate à l’Américaine, il est intéressant de se pencher du coté de nos voisins allemands du SPD. J’ai déjà évoqué le pseudo nouveau modèle italien avec VELTRONI qu’il faut regarder avec circonspection il y a quelques jours sur ce blog.Pour mémoire, Angéla Merkel gouverne le pays dans une coalition avec le SPD. Le parti socialiste allemand a refusé de faire alliance avec le Die LINKE d’Oscar LAFONTAINE, bien que la gauche fut majoritaire…
Le SPD a tenu son congrès fin octobre. Il est intéressant de voir que le SPD a réorienté son programme pour renforcer son profil social. En clair, après des dérives droitières, et une coalition avec la droite, le SPD se recentre sur sa gauche pour faire face à la pression du Die Linke, et surtout de peur de perdre les prochaines élections !
Je vous livre 2 articles du Monde qui résume bien la situation et qui sont à méditer…
A suivre…
DH
Les sociaux-démocrates allemands se rééquilibrent à gauche (*)
Article paru dans l'édition du Monde du 26.10.07
Le congrès du parti, qui s'ouvre vendredi à Hambourg, doit remettre l'accent sur l'Etat social. Les tenants de la ligne « sociale-libérale » se font discrets
Le Parti social-démocrate allemand est-il à l'image d'une épave à la dérive sur une mer tumultueuse ? La couverture de la dernière édition du magazine Der Spiegel témoigne du climat d'incertitude qui règne au sein du SPD alors que ses membres se réunissent en congrès à Hambourg à partir de vendredi 26 octobre.
A la traîne dans les sondages - il stagne à moins de 30 % depuis des mois -, le parti est pris en tenaille entre les unions chrétiennes CDU-CSU, ses partenaires au gouvernement, et le nouveau parti d'opposition Die Linke. A droite, les chrétiens-démocrates lui volent la vedette sur des sujets aussi porteurs que la famille ou l'environnement et profitent de l'aura internationale qui continue d'entourer la chancelière Angela Merkel (CDU). A gauche, le SPD se voit court-circuité sur les thèmes de la justice sociale par Die Linke.
Pour reprendre l'offensive dans la perspective des élections de 2009, Kurt Beck, président du SPD et ministre-président de Rhénanie-Palatinat, cherche à renouer avec l'électorat de gauche. Le nouveau programme, qui doit être adopté lors du congrès, met l'accent sur les références au « socialisme démocratique » et à « l'Etat social prévoyant ».
Autre concession faite à l'aile gauche du parti, l'arrivée d'Andrea Nahles à la tête du SPD. Après avoir été une farouche adversaire de l'ex-chancelier Gerhard Schröder et avoir provoqué le départ anticipé de Franz Müntefering de la présidence du parti en novembre 2005, elle doit être élue vice-présidente en même temps que Frank-Walter Steinmeier, ministre des affaires étrangères, la cheville ouvrière des réformes lorsqu'il était le bras droit de M. Schröder à la chancellerie.
Dans ce droit-fil, M. Beck souhaite revenir sur l'une des mesures phares du programme de l'agenda 2010, hérité de l'ère Schröder, et va soumettre aux délégués une proposition qui vise à allonger la durée de versement de l'allocation chômage pour les plus de 45 ans, réduite à 12 mois sous la coalition SPD- Verts.
Soutenue par la base et l'aile gauche du parti, cette stratégie a donné lieu à un bras de fer avec M. Müntefering, vice-chancelier et ministre du travail. Pour éviter un conflit lors du congrès, ce dernier a expliqué la semaine dernière qu'il allait se plier à la volonté du parti.
Ses autres collègues au gouvernement, le ministre des finances, Peer Steinbrück, ou M. Steinmeier, sont tout aussi sceptiques, mais évitent de contredire M. Beck. Ils savent qu'il faut apaiser la base du parti très remontée contre l'agenda 2010 et répondre à l'aspiration d'une plus grande justice sociale au sein de la population. Si l'économie allemande a pu profiter des réformes initiées par le SPD, elles lui ont beaucoup coûté en terme d'image. Entre 1998, date de l'élection de Gerhard Schröder à la chancellerie et 2007, le nombre d'adhérents a chuté de 775 036 à 545 223 personnes.
Aussi, la proposition de M. Beck devrait être adoptée à une large majorité. Pour le politologue Richard Stöss, professeur à l'Université libre de Berlin, plus qu'un revirement à gauche, la stratégie du SPD se veut être un rééquilibrage par rapport à 1998, lorsque M. Schröder avait fait campagne sur le thème de l'innovation et de l'équité. Ce deuxième aspect avait disparu après le départ d'Oskar Lafontaine, aujourd'hui président de Die Linke, et l'adoption de l'agenda 2010.
Reste à savoir si cette réorientation portera ses fruits. Des élections régionales fin janvier en Basse-Saxe, en Hesse et à Hambourg serviront de test. A plus long terme, cette stratégie pourrait permettre au SPD de former une coalition avec Die Linke même si, officiellement, la direction du parti continue de l'exclure.
En dehors de la politique sociale, d'autres sujets promettent de donner lieu à des débats enflammés. Conduit par le ministre social-démocrate Wolfgang Tiefensee, le projet de privatisation partielle de la Deutsche Bahn, la société allemande des chemins de fer, heurte de nombreux sociaux-démocrates. Beaucoup craignent que l'entreprise publique devienne la proie d'investisseurs mal intentionnés. Là encore, M. Beck devrait imposer ses vues en proposant, pour 25,1 % du capital de l'entreprise, l'émission d'actions populaires, dépourvues d'un droit de vote. M. Steinbrück est opposé à cette motion, craignant qu'elle tienne les investisseurs à distance.
En politique étrangère, c'est la participation à l'opération de lutte antiterroriste « enduring freedom » (liberté immuable) (OEF) dirigée par les Etats-Unis qui suscite la controverse. Le ministre des affaires étrangères aura la délicate mission de défendre cet engagement.
Allemagne : CONGRÈS SOCIAL-DÉMOCRATE DE HAMBOURGLe programme du SPD est réorienté pour renforcer son profil social (*)
Article paru dans l'édition du Monde du 30.10.07
Le parti social-démocrate allemand (SPD) s'est doté, dimanche 28 octobre, à l'issue d'un congrès de trois jours à Hambourg, d'un nouveau programme qui renforce son profil social et atteste d'une réorientation à l'égard de la politique menée par l'ex-chancelier Gerhard Schröder. Intitulé « Démocratie sociale au XXIe siècle », ce texte de 36 pages remplace le programme de Berlin adopté par le parti en décembre 1989, quelques semaines après la chute du mur.
A deux ans des prochaines élections, le SPD, qui gouverne en coalition avec son principal adversaire, le parti chrétien-démocrate de la chancelière Angela Merkel, émet ainsi un signal en direction de son électorat tenté par le nouveau parti La Gauche d'Oskar Lafontaine. « Il s'agit d'un changement de cap, nous prenons désormais davantage en compte les intérêts des salariés », affirme Ottmar Schreiner, député SPD de l'aile gauche du parti.
Ce courant gagne en influence, comme le prouve la controverse autour du projet de privatisation partielle de Deutsche Bahn, la société allemande des chemins de fer. Le président du parti, Kurt Beck, a dû batailler ferme au congrès pour imposer, contre l'avis du ministre des finances Peer Steinbrück, une résolution demandant d'introduire un système d'actions préférentielles pour protéger Deutsche Bahn contre l'influence d'investisseurs extérieurs. Ce compromis n'allait pourtant pas assez loin pour un grand nombre de sociaux-démocrates, qui refusent toute idée de privatisation.
Le programme du SPD met l'accent sur le « socialisme démocratique » qui « reste pour nous la vision d'une société solidaire, libre et équitable, dont la réalisation constitue pour nous un devoir permanent ». Le président du SPD s'était engagé sur ce point contre l'avis de plusieurs représentants de l'aile pragmatique, qui réclamaient le remplacement de cette référence par le terme de « démocratie sociale ». En même temps, le capitalisme est critiqué à plusieurs endroits du texte.
Le principe d'un « état social prévoyant » est considéré par de nombreux sociaux-démocrates comme la principale innovation du nouveau programme. Pour le SPD, l'Etat doit non seulement couvrir les risques sociaux, mais aussi agir en amont en garantissant l'égalité des chances grâce à une politique d'éducation : « La politique d'éducation est un élément central de la politique sociale. » Le programme se prononce pour la multiplication des écoles ouvertes toute la journée (Ganztagschulen) et une meilleure prise en charge des enfants âgés de moins de 3 ans.
La protection de l'environnement, déjà l'un des points forts du texte de 1989, devient un enjeu de la politique étrangère sociale-démocrate. « La protection du climat et l'accès à l'énergie, aux ressources (...) sont devenus une question éminente de la sécurité internationale ». Le texte réaffirme l'objectif de sortie du nucléaire et se distingue ainsi des unions chrétiennes CDU-CSU, qui plaident pour un allongement de la durée d'activité des centrales atomiques.
L'amélioration des conditions de travail et du pouvoir d'achat constitue un autre axe. Le SPD souhaite instaurer des salaires minimums en Allemagne et en Europe, et aller plus loin que l'accord obtenu en juin dernier avec les chrétiens-démocrates, qui prévoit l'extension d'une législation sur le salaire minimum à une dizaine de branches. Par ailleurs, le programme réclame des augmentations de salaires en fonction de la hausse de la productivité et du niveau de l'inflation.
(*) Cécile Calla