Extrême droite et démocratie, expérience personnelle…
J’ai ouvert ce blog en janvier 2006. J’ai fait le pari éditorial de répondre à tous les commentaires et de ne pas les censurer.
J’ai tenu jusqu’à aujourd’hui, malgré des commentaires parfois rudes de l’opposition à la municipalité à laquelle j’appartiens.
Vitrolles n’est pas une ville ordinaire. Vitrolles a été marquée par une montée de l’Extrême Droite dans les années 90, qui s’est concrétisée par la prise de la mairie par Catherine MEGRET de 1997 à 2002.
L’Extrême – Droite au pouvoir même au niveau local, n’est pas une chose anodine. Ce blog a aussi pour objectif d’apporter un témoignage sur cette période, et sur les conséquences de la gestion FN/MNR, comme sur l’accession au pouvoir de l’équipe MEGRET.
Nous sommes en 2006, et Le PEN tend à être banalisé, l’âge aidant, dans les médias. Ce blog est la démonstration que sous une image qui tend à se banaliser, à se civiliser avec Marine Le PEN, à gommer certaines amitiés, à cacher certains sentiments, le FN reste toujours ancré dans ses vieux démons.
Pendant plusieurs mois, un responsable du FN Vitrollais, sous le pseudo CICERON » a déposé des commentaires sur mon blog. Cela a donné lieu à des échanges parfois vifs, parfois limites, mais en final très instructif à mon sens pour les uns comme les autres. Nous ne nous sommes pas épargné l’un et l’autre. Cela a permis de mieux nous connaître, et parfois lever certains clichés ou à priori. Cela m’a permis aussi de mieux cerner et mieux comprendre la pensée profonde du militant engagé du FN.
Ces derniers jours, des militants des « jeunesses identitaires » ont déversé une avalanche de commentaires sur le blog avec de multiples renvois sur leurs blogs et sites internet. Les jeunesses identitaires, renvoient à des mouvances les plus extrêmes, les plus haineuses, les plus racistes et les plus dangereuses de l’Extrême Droite Française. Est - il possible de débattre avec eux ? Est - il nécessaire de débattre avec des gens qui en final rejettent la démocraie, les droits de l'homme et les fondements de notre République ?
La « surprise » fut le soutien à cette mouvance du responsable FN Vitrollais.
Mon blog n’ayant pas vocation à être une tribune pour la diffusion de l’extrême droite la plus dure, j’ai décidé dans un premier temps de ne pas répondre aux commentaires.
L’avalanche de haine ne s’est pas fait attendre du responsable du FN Vitrollais en s’attaquant non plus sur les idées mais sur les personnes, avec des menaces à peine voilées. Le débat n’étant plus possible, je supprime donc tous les commentaires en conservant, à toutes fins utiles une copie des messages.
La première réflexion que je tire de cette expérience, c’est que le FN ne change pas et n’évolue pas. La pensée profonde reste la haine de l’autre, et une guerre des croisés chrétiens, contre le monde musulman. Le FN n’est pas un parti comme un autre. Il ne faut jamais le banaliser. Devant une façade qui recherche une respectabilité, avec Marine Le PEN par exemple, se cache toujours la pire idéologie.
La seconde réflexion pose la question de la démocratie et de l’extrême droite. Par une nouvelle avalanche de commentaires, que je supprime au fur et à mesure, je me fais attaquer pour être un non démocrate et refuse le débat. Mais peut –on réellement débattre avec des gens qui n’ont que la haine à la bouche et qui refusent la différence ? La Belgique, est aussi confrontée à la montée de l’Extrême Droite ; On peut trouver de nombreux articles sur ce sujet sur la toile internet. La Sénatrice Belge Marie-José LALOY s’interroge sur cette question. Je vous livre sa réflexion, qui me parait très pertinente.
Pour finir provisoirement, je reviendrai sur ce sujet, je rappelle que j’ai toujours fait la distinction entre l’électeur FN qui pour une raison ou une autre, rarement par idéologie se tourne vers ce parti pour trouver des solutions à ses problèmes, et les militants FN qui eux ne peuvent pas ignorer, et donc adhérent idéologiquement à la pensée FN, à son histoire, à son dessein,…
A suivre,
DH
NB : Je ferai à l'occasion à l'intention des internautes, une analyse des commentaires que je reçois et supprime, sur leur teneur, leur origine, etc.
Quand l’Extrême Droite prend la démocratie en otage ? (*)
Le vote d’extrême-droite, qu’il soit d’adhésion ou de protestation, fait malheureusement partie du paysage électoral, en Belgique comme dans la plupart des Etats européens. Une interprétation optimiste du phénomène voudrait y voir la force de la démocratie et sa capacité à intégrer politiquement ce qui la conteste. La représentation de l’extrême droite dans les institutions et sa quête de respectabilité éviteraient la dispersion, autrement dangereuse, de ses partisans dans les rues. De ce point de vue, la violence des discours se substitue alors aux violences physiques de bandes incontrôlables, comme un moindre mal.
Une interprétation plus pessimiste soulignerait la permanence de ce socle électoral et la banalisation des idées d’extrême droite dans la société tout comme leur influence sur le débat politique (les fameuses mauvaises réponses à de bonnes questions).
La démocratie est prise en otage ; l’électeur a le pouvoir de la libérer
Thermomètre d’une société malade qui ne parviendrait pas à guérir, le fardeau d’extrême droite serait le prix de notre relative impuissance à transformer l’ordre des choses.
L’extrême droite instrumentalise la démocratie, en suggérant une interprétation restrictive du pluralisme des opinions. Elle s’en proclame afin de progresser électoralement. Pour ce faire, elle n’hésitera jamais à flatter les passions populaires (« le peuple a toujours raison »). Usant de l’invective plutôt que d’arguments, les partis d’extrême-droite, populistes ou fascistes, revendiquent le respect de leurs opinions et de leurs électeurs dont ils se disent les porte-parole. Dans le même temps les autres partis sont considérés comme des ennemis ou des traîtres (au pays, à une communauté, au peuple).
La démocratie, comme système de valeurs et rassemblement des différences dans une volonté de vivre ensemble, est par contre rejetée.
Dans la conception simpliste d’un monde dual, séparant ‘profiteurs’ et ‘gens honnêtes’, ‘amis’ et ‘ennemis’, ‘nationaux’ et ‘étrangers’, il n’y a de victoire possible que dans la négation politique de l’autre.
De la même façon qu’il n’y a pas de compromis possible avec les ennemis de la démocratie, l’extrême droite ne peut exister qu’en cultivant sa raison d’être ‘anti-système’.
A la fois à l’intérieur et à l’extérieur du champ démocratique, l’extrême droite joue habilement de cette ambivalence : elle met au défi les forces démocratiques d’accepter sa présence au nom de valeurs (pluralisme politique, liberté d’expression) qui lui sont étrangères.
Dans le même temps elle sape les fondements de nos institutions démocratiques.
Nous en sommes toujours à chercher une réponse à ce défi.
On sait que l’interdiction n’apporte pas de solution durable au phénomène de désarroi, de ressentiment ou d’égoïsme social qu’exprime alternativement l’extrême droite. Briser le thermomètre ne fait pas baisser la fièvre d’un corps social tourmenté.
Le ‘cordon sanitaire’ déployé au nord du pays, dans une perspective prophylactique suggérée par l’usage de la métaphore médicale, a également montré ses limites. Il n’a pas empêché la diffusion des thèses du Vlaams Belang par de multiples relais (notamment des médias souvent complaisants, au croisement de leur lectorat et de l’électorat potentiel du VB). La prégnance de l’idéologie d’extrême droite dans la société flamande tétanise littéralement les autres partis. L’ordre du jour politique semble insidieusement fixé par le VB. Les dirigeants de ce parti sont parvenus à transformer leur marginalisation forcée en puissance politique déterminante.
Enfin, la suppression de la dotation financière s’attaque bien au nerf de la guerre mais en confortant précisément le discours le plus convenu de l’extrême droite : les partis traditionnels sont complices pour faire taire les seuls authentiques porte-parole du peuple.
La démocratie est prise en otage ; l’électeur a le pouvoir de la libérer.
(*) Marie-José Laloy