L’irrésistible déclin du MNR
Article paru dans l'édition de l’HUMANITE du 8 octobre 200
Mauvaise année pour Bruno Mégret et son mouvement le MNR. Il y a d’abord le score obtenu à la présidentielle : 2,35 %. L’objectif était de faire mieux qu’aux européennes avec 3,29 %. Pis : au second tour, il a dû se désister officiellement pour Le Pen face à Chirac avec lequel pourtant il rêvait de faire alliance.
Aux législatives, c’est la Berezina : 1,09 % et seulement huit candidats dépassant le seuil des 5 %. Lui-même est battu dans la circonscription à laquelle appartient Vitrolles.
Et puis il y a eu ce fameux 14 juillet et l’attentat contre le président de la République. L’auteur, Maxime Brunerie, militant d’Unité radicale, avait partie liée avec le mouvement de Bruno Mégret dont il était sympathisant. Ne figurait-il pas sur la liste mégretiste aux municipales de 2001 dans le 18e arrondissement de Paris, ainsi que mandataire financier de Cyril Bozonnet, candidat aux législatives ?
Le coup de grâce aura été porté par les électeurs de Vitrolles après que le Conseil d’État a décidé l’annulation de l’élection de Catherine Mégret pour diffusion de tracts diffamatoires à l’encontre du candidat de droite.
Pourtant, il a tout essayé, Bruno Mégret. Notamment en se défaisant de Fabrice Robert et Philippe Boucher, précisément membres d’Unité radicale, histoire de ripoliner la façade. Las. Réfugié dans son bureau de vrai-faux maire à Vitrolles, il ne pouvait qu’enregistrer, jour après jour, les défections de ses anciens amis qui avaient cru tenter l’aventure MNR, en 1999. Une aventure en forme de tentative de captation d’héritage lepéniste. Mais pas seulement.
Bruno Mégret n’a pas été exclusivement celui qui voulait être calife à la place du calife. Sa démarche ne se réduit pas à cette ambition, même si elle y participe. Le leader du MNR, analysant la dérive droitière de l’opinion publique en général et le discours ainsi que les actes de plus en plus musclés de la droite, pensait que l’heure était venue pour un rapprochement avec la droite classique à laquelle il avait appartenu au sein du RPR. On se souvient des élections régionales ou une partie de la droite avait fait alliance avec l’extrême droite pour diriger des exécutifs régionaux, à l’instar d’un Charles Million en Rhône-Alpes. Parallèlement à Le Pen, arc-bouté sur la ligne d’opposant à " la bande des tous pourris de l’establishment ", le positionnement stratégique de Mégret devait permettre à l’extrême droite de balayer un plus large éventail politique, tout en faisant son entrée dans les affaires de l’État. · Saint-Laurent-sur-Manoire (Dordogne), lors de l’université d’été du MNR en septembre, Bruno Mégret avait tenté une nouvelle fois de se faire pédagogue auprès des 250 militants rassemblés. " Le MNR est un mouvement de droite, de vraie droite, situé entre l’extrême droite et le centre. Il est à la gauche du Front national et à la droite de l’UMP ", avait-il expliqué. Ajoutant : " Si nous nous opposons au système, nous ne devons pas traiter tous ceux qui ne sont pas avec nous comme s’ils étaient contre nous et n’avoir autour de nous que des ennemis ou des adversaires. Dans les trois dernières années, le RPR et l’UDF ont, en nous assimilant au FN, maintenu à notre égard une attitude d’ostracisme qui leur a été dictée par la gauche et par certains médias.
Cette attitude, qui a d’ailleurs évolué, est sans fondement : l’UMP n’est pas notre ennemie principale [...] nous pourrions avoir des accords. Un credo : rassembler tous ceux qui sont d’accord avec les principales idées du FN mais sans le fascisme, sans le ringardisme, sans les outrances et les dérapages, sans racisme ni antisémitisme. " Bref, " avec tous ceux qui sont d’accord avec les intentions affichées de l’UMP ". Le problème, pour Bruno Mégret, est que ce créneau-là est désormais occupé par le gouvernement Raffarin et Nicolas Sarkozy. On ne voit pas bien dès lors ce que l’UMP aurait à gagner d’une alliance aussi sulfureuse, se contentant de jouer à la marge avec un Front national d’autant plus utile qu’il vaut à la fois repoussoir électoral et aiguillon idéologique. Vitrolles et le désistement républicain du candidat UMP pourraient bien avoir sonné le glas de la portée stratégique du MNR.