L’apartheid municipal
Paru dans l’Humanité du 27/04/2002
Alain Hayot est sociologue, conseiller municipal à Vitrolles, tête de liste PCF aux dernières municipales. Il évoque la gestion quotidienne de l’extrême droite dans son laboratoire.
Comment définir la politique concrète de l’extrême droite à Vitrolles ?
Alain Hayot. Il y a en fait deux politiques. L’une qui valorise et apporte des réponses à la vie quotidienne dans la partie de la ville " incluse ", celle qui vit dans des conditions correctes, basée sur la propreté et la gestion urbaine. Et puis il y a une politique délibérée de mise à l’écart, de marginalisation de toutes les cités populaires. Elles sont considérées comme des bantoustans, où l’on favorise l’émergence de zones de non-droit. C’est un véritable apartheid, où l’on met en place des cordons sanitaires pour isoler la population, la contenir, l’enfermer, et au final la faire fuir. Cela donne des situations apocalyptiques dans certaines cités. Il n’y a plus de politique sociale, socioculturelle, rien pour la jeunesse et surtout la jeunesse qui en a le plus besoin.
Les exemples d’Orange, de Vitrolles et de Marignane montrent qu’une fois au pouvoir, il est très difficile de déloger l’extrême droite ?
Alain Hayot. L’extrême droite est parvenue à créer une société civile acquise aux idées de repli sécuritaire, de xénophobie, dans une logique de " petit Blanc ", tranquille chez nous, tout en excluant une part importante de
Comment est traitée l’opposition municipale ?
Alain Hayot. Les deux groupes d’opposition ne disposent de rien : ni logistique, ni locaux. Nous nous trouvons face à une logique de parti unique qui possède tous les pouvoirs sans contrôle. L’atmosphère du conseil municipal est abominable et l’opposition est considérée comme constituée d’élus de seconde zone. Catherine Mégret coupe le micro, insulte. J’ai même failli être lynché par des conseillers MNR et des militants quand j’ai proposé une aide pour les sinistrés des inondations d’Alger. Il y a des pressions et des tensions énormes dans le conseil, tout est mis en place pour nous faire adopter un profil bas.
Pourtant, des perspectives existent ?
Alain Hayot. La gauche a subi un fort contrecoup après l’échec des municipales de mars 2001. Elle a eu beaucoup de difficultés à remonter la pente, mais il reste une gauche debout, vivante, qui se bat à Vitrolles. Dès les législatives elle sera en capacité de s’opposer à Mégret. C’est une ardente obligation.
Propos recueillis par Marc Leras