" Pour une France généreuse et ouverte "
Article paru dans l'édition de l’HUMANITE du 17 février 2001.
Six ans déjà, six ans de trop ! Nous le disions à l’époque. Aux municipales de 1995, tout semblait sourire au parti de Jean-Marie Le Pen. L’extrême droite remportait Toulon, Marignane, Orange et deux ans plus tard Vitrolles. Ces villes du sud de la France seraient non seulement les " laboratoires " d’une gestion efficace des idées frontistes - " les Français d’abord (sic) ! -, mais, en plus, elles préfiguraient une irrésistible ascension. Tremblez démocrates ! Fort heureusement, on connaît la suite.
De laboratoires, ces villes sont devenues des vitrines de ce que nous dénoncions depuis longtemps : la démagogie et la haine pour seul programme, l’incapacité à gérer la " respublica ", la chose publique, une " préférence nationale " pour calfeutrer l’absence d’intérêt pour la cité, le fossé creusé artificiellement entre les différentes composantes de la population, le rejet de toute forme de vie culturelle. La liste est longue.
Le tout sous couvert d’une stratégie de provocations et une volonté de vouloir systématiquement se poser en victime de l’hostilité des démocrates. Mais comment ne pas réagir lorsque Catherine Mégret déclare, en février 1997, aussitôt élue, dans une interview au journal allemand Berliner Zeitung, qu’" il y a des différences entre les races... il y a des différences entre les gènes. (...) Les immigrés (...) ne sont là que pour prendre l’argent ". Propos qui furent condamnés.
J’ai personnellement souvent constaté leur attitude arrogante, notamment lors de ma venue, en compagnie de Danielle Evenou et du réalisateur Denis Amar, sur un marché de Vitrolles pour soutenir les militants locaux. Les heurts ont éclaté lorsque nous avons croisé Bruno Mégret et son épouse, entourés de nervis. Injures, jets de gaz lacrymogènes et même un membre du service d’ordre du couple sortant un pistolet... J’ai connu mieux comme accueil. Mais il est très révélateur de l’ambiance totalitaire que les époux ont tenté d’imposer à la ville en voulant caporaliser les mentalités. Ainsi qui a oublié l’incroyable " offense " que ce directeur d’école, a infligé à Catherine Mégret en la saluant, mais en refusant de lui serrer la main, afin de " garder ses distances avec des élus dont les valeurs sont aux antipodes des siennes " ? Résultat : son acte lui a coûté sa place. On croit cauchemarder. En fait de bilan de gestion municipale, les villes frontistes ne peuvent guère afficher que leurs non-résultats. Ces gens-là sont des illusionnistes dont le seul talent et la nuisance.
Rester vigilant est donc plus que jamais d’actualité. Car il serait dangereux d’oublier, même si les appareils d’extrême droite sont en piteux état, que les idées du FN ont gangrené la société française. Que cela soit dans ces entreprises, où l’on n’hésite pas à recruter uniquement " bleu, blanc, rouge ", ou dans le secteur des soins, du loisir, du logement, où un Zidane c’est bien sur le terrain de football mais pas à côté de chez soi. En fait, le constat est alarmant et atteint presque la cote d’alerte, tant le racisme s’est banalisé alors qu’on l’excusait presque hier du fait de la crise économique. Or depuis la reprise de la croissance, qui a constaté une amélioration ? Pas moi. Au contraire, la situation se dégrade même. C’est donc à un nouvel effort que je vous invite. Aller voter aux prochaines municipales contre l’extrême droite, pour la solidarité et la fraternité, pour une certaine idée de la France généreuse et ouverte.