Vitrolles : fin de campagne à hauts risques
Article paru dans l'édition de l’HUMANITE du 8 février 1997
Le second tour des élections municipales partielles aura lieu demain. La mobilisation des habitants au cours des derniers jours pourrait permettre d’éviter que le Front national s’empare de cette ville et en fasse son quatrième fief.
VITROLLES, demain soir, aura élu sa nouvelle municipalité. En attendant le verdict des urnes, il y aura sans doute aujourd’hui encore des centaines de mini-débats pour convaincre. Convaincre que le Front National ne doit pas faire main basse sur cette ville de 38.000 habitants : ici, chacun est conscient que la conquête de la municipalité n’est que la première étape d’une ambition à l’échelle du département et de la région Provence-Alpes-Côtes d’Azur. Voire plus vaste encore. Bruno Mégret, jeudi soir : « Nous pouvons être fiers de ce vote (du premier tour), c’est un record absolu, il a impressionné l’Europe entière. »
Jeudi soir avait donc lieu le meeting électoral du FN. Les observateurs ont évoqué la présence de 1.500 personnes. Le ton a été donné par Hubert Fayard, numéro deux de la liste Catherine Mégret. Il a fait huer Lionel Jospin et Robert Hue : « Tous ces politiciens sont venus donner des leçons que les Vitrollais n’acceptent pas », a-t-il dit. Bruno Mégret : « Vous êtes une véritable élite civique. Vous avez compris ce que d’autres ailleurs n’ont pas compris. » Bruno Mégret encore : « Je n’autorise pas les menteurs, les tricheurs, les mis en examen, à dire qui est républicain et qui ne l’est pas. » Il a oublié de rappeler qu’il est lui-même suffisamment tricheur pour être frappé d’inéligibilité. Jean-Jacques Anglade, tête de la liste d’union de la gauche, a d’ailleurs, hier, déposé un recours en annulation du premier tour devant le tribunal administratif « compte tenu de la multiplication des infractions commises par la liste FN, la diffusion de fausses nouvelles, la diffusion d’un faux sondage et la diffamation. »
Du côté de la liste Anglade, on a enregistré de nouveaux soutiens de personnalités nationales. Tel celui apporté par le député européen UDF Simone Veil. « Vitrolles est menacée par le Front national, a-t-elle indiqué dans un message à l’attention des habitants de Vitrolles, la candidate Catherine Mégret n’est qu’un trompe-l’oeil. C’est l’appareil du FN qui serait en place à la mairie. Ce n’est pas ce que vous voulez. Vous ne pouvez l’accepter. » Hier soir, une chaîne humaine devait symboliquement encercler l’hôtel de ville pour l’empêcher de tomber dans les filets de l’extrême droite.
L’issue de cette situation électorale est entre les mains des abstentionnistes du premier tour, de ceux qui ont voté FN pour donner un coup de semonce au maire sortant mais qui ne veulent pas pour autant élire une municipalité d’extrême droite. Et, aussi, évidemment, de l’électorat RPR-UDF. L’étude des duels gauche-FN de second tour montre que, d’une manière générale, 20% de ces électeurs s’abstiennent, 30% votent à gauche et 50% FN. Dans ce cas, la liste Mégret pourrait être élue. Mais Vitrolles est aussi un cas particulier. Et il faudra aussi compter sur l’attitude du RPR au plus haut niveau. Alain Juppé semble décidé à ce que le mouvement qu’il préside entre en lutte ouverte contre le FN, les positions de la droite classique étant elles aussi de plus en plus menacées.