Le FN fonde sa campagne à Vitrolles sur la priorité aux « familles françaises »
Article paru dans l'édition du Monde du 21 Janvier 1997
CATHERINE MÉGRET a rendu publique, samedi 18 janvier, la liste qu'elle conduit aux élections municipales partielles provoquées à Vitrolles, dans les Bouches-du-Rhône, le 2 février, par l'annulation du scrutin de juin 1995. Réunis dans un grand hôtel de la zone aéroportuaire, trois cents militants et élus municipaux Front national des Bouches-du-Rhône ont entendu des exposés thématiques présentant l'action que la candidate compte mener en compagnie de son mari, Bruno Mégret, « le patron », selon le numéro deux de la liste, Hubert Fayard.
La liste Allez Vitrolles ! est composée d'un mélange de membres de l'équipe nationale de M. Mégret et de responsables du cru. Trente-neuf candidats, « une famille où chacun est différent et proche à la fois », parmi lesquels « dix mères de famille, sept anciens membres du RPR » dont le directeur de cabinet du maire de Marignane , « deux anciens membres de l'UDF, neuf rapatriés, deux ouvriers », des commerçants et artisans, des cadres et des chefs d'entreprise.
Dans Allez Vitrolles !, journal local du Front national, elle s'appelle Annick, se dit sans emploi et habite le quartier du Liourat. Elle déclare, au milieu d'autres témoignages de « Vitrollais » : « C'est vrai, aux dernières élections, j'ai eu peur (...), mais maintenant je vois que ça se passe bien à Marignane et je vois comment c'est ici (...). Je vais voter pour la liste Mégret. » Mais voilà, la photo qui illustre le texte ne laisse pas de doute : Annick est en fait Sabine, une des secrétaires du Front national. Elle travaille au siège du parti, à Saint-Cloud, dans les Hauts-de-Seine.
HOMMES DE CONFIANCE
La « haut » de la liste fait la part belle à de récents, et même très récents, Vitrollais. Certains, comme Albert Motte ou André Agostini, ne sont pas inscrits sur les listes électorales de Vitrolles, et l'on ignore s'ils y acquittent une contribution directe (le code électoral impose de remplir une de ces deux conditions pour pouvoir être candidat aux élections municipales dans une commune).
Le souci du couple Mégret semble avoir été de s'entourer d'hommes de confiance. M. Fayard est devenu le bras droit de M. Mégret depuis son « parachutage » d'Auvergne, où il est conseiller régional, juste avant les élections de juin 1995. C'est sur lui que le délégué général compte pour faire tourner la mairie en son absence. Les finances devraient être confiées à un autre permanent du parti d'extrême droite, André Nouar, chargé de mission du groupe au conseil régional Provence-Alpes-Côte-d'Azur et l'un de ceux qui rédigent les argumentaires du parti au sein de la délégation générale. La culture reviendrait à Gauthier Guillet, un Parisien membre de la cellule « idées » du Front national et qui s'est présenté dans Allez Vitrolles ! ou dans les tracts comme membre du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers, affirmation démentie le 10 janvier par le président de la fédération des Bouches-du-Rhône de ce mouvement.
Les supposés futurs adjoints ont présenté leur programme sous les chapitres suivants : réduire la délinquance, la fraternité pour les Français, assurer l'avenir de nos enfants, des emplois pour les Vitrollais et, bien sûr, « abaisser les impôts ». Annonçant, par exemple, onze mesures contre l'insécurité, le colonel Castillon, « dix-huit ans dans les renseignements français », a proposé une hausse du budget consacré à ce domaine, le doublement des effectifs de la police municipale et la création d'« un service municipal de protection des Vitrollais ». Josette Clément, responsable de Fraternité française, l'organisation caritative créée par le Front national, a promis le développement des crêches, des centres aérés, des aides sociales « pour les familles vitrollaises françaises » et de favoriser l'accession de ces mêmes familles à la propriété.
Au terme de cet après-midi, le Front national a annoncé que Fraternité française organisera mardi soir une grande distribution de colis aux nécessiteux de la ville. Cette initiative improvisée semble être une riposte à la soirée de prière organisée par les quatre responsables des communautés religieuses au même moment (Le Monde du 15 janvier). Elle aura lieu à quelques dizaines de mètres de la cérémonie puisque le local du Front national est installé dans la même rue que le temple protestant où les prières doivent se dérouler.