De là à demander un référendum...
Sarkozy et son gouvernement ont l'art de prendre les français pour des imbéciles et plus grave encore de prendre de ne pas s'encombrer avec la démocratie.
Cela a été le cas avec le mini-traité européen de Lisbonne. C'est aujourd'hui le cas avec le retour de la France dans le commandement de l'OTAN. Je reviendrai sur l'OTAN dans une prochaine édition, car ce n'est pas anodin, et ce n'est pas sans conséquence sur notre indépendance, notre défense et la défense européenne.
Ce que je veux souligner aujourd'hui, c'est le profond mépris du Ministre de la Défense Hervé Morin envers les français qui ballait d'un revers l'idée même d'un référendum. Sa réponse est absolument choquante. Elle s'inscrit dans la démarche de Sarkozy, « vous m'avez élu (pas moi !) alors je fais ce que je veux ! »
Allons - nous pouvoir supporter une telle arrogance aussi longtemps ?
DH
Hervé Morin : "Non à un référendum sur l'OTAN"
Début avril, la France va faire son retour dans les structures militaires de l'OTAN. C'est la grande rupture avec le gaullisme ?
Le général de Gaulle n'a jamais quitté l'Alliance atlantique, Il a quitté le commandement intégré de l'OTAN en 1966 dans un contexte très particulier, celui de la guerre froide. L'OTAN était alors une structure militaire qui planifiait une éventuelle confrontation avec le pacte de Varsovie. Vingt-trois ans plus tard, en 1989, il s'est produit un événement majeur, la chute du mur de Berlin et l'effondrement du bloc communiste. Dans la foulée, l'Europe a progressivement retrouvé son unité, les pays d'Europe centrale et orientale se sont mis à rejoindre à la fois l'Alliance atlantique et l'Union européenne. Le contexte a donc radicalement changé. On est passé d'une OTAN structure militaire, prête à faire la guerre au pacte de Varsovie, à une Alliance atlantique à la fois système de sécurité collective et instrument de maintien de la paix au service des Nations unies. La France a peu à peu réintégré l'ensemble des structures de l'Organisation C'est un général français qui a commandé les forces de l'OTAN en Afghanistan en 2005.
Que répondez-vous à ceux qui s'inquiètent pour l'indépendance de la France ?
Les décisions au sein de l'Alliance atlantique se prennent à l'unanimité. Il suffit que quelqu'un lève le doigt pour dire "je ne suis pas d'accord", pour que les choses ne se fassent pas. On ne participe aux opérations que si on le souhaite.
N'est ce pas une faiblesse de l'Europe réunifiée que de dire : "Il faut se mettre dans le giron américain pour se protéger..."
La construction d'une défense européenne est notre ambition. Mais il fallait lever un préalable. Lorsque nous faisions nos propositions à nos partenaires européens, ils disaient, "les Français parlent d'Europe de la défense pour affaiblir l'Alliance atlantique". Et donc, l'Europe de la défense était totalement encalminée. L'intuition du président de la République a été de dire, "il doit y avoir une complémentarité entre l'Europe de la défense et l'Alliance atlantique, et je veux que l'Europe de la défense se fasse". Nous voulons, par notre démarche, européaniser l'OTAN.
Invoquant la gravité de la décision, François Bayrou, le président du MoDem, demande l'organisation d'un référendum. Que lui répondez-vous ?
Si l'on s'attache au parallélisme des formes, le général de Gaulle avait quitté le commandement intégré sur une simple lettre. Alors, aujourd'hui...
Vous croyez qu'une simple lettre suffira ?
Cela me semble un peu court. Mais de là à demander un référendum... Nous sommes dans un système parlementaire, il y a une représentation nationale, consultons-la. A un référendum, on ne répond jamais à la question posée.
Nicolas Sarkozy a évoqué l'organisation d'un débat au Parlement avant la réunion de l'OTAN. Pourra-t-il être suivi d'un vote ?
Les conditions du débat ne sont pas fixées, laissez-nous le temps d'organiser tout ça.
Cela risque de tanguer dans la majorité Alain Juppé craint "un marché de dupes", Dominique de Villepin dénonce "une banalisation de notre diplomatie"...
J'ai beaucoup d'admiration pour l'un et l'autre mais, je me permets de vous rappeler ceci : qui était premier ministre et qui était secrétaire général de l'Elysée lorsque la France avait négocié notre éventuel retour dans la structure intégrée de l'OTAN en échange d'un simple poste à Naples ? Alain Juppé et Dominique de Villepin. De 1996 à 2009, il doit y avoir des choses qui m'ont échappé.
Les Etats-Unis demandent aux Européens de renforcer leur présence en Afghanistan. Que va faire la France ?
Il n'est pas question, pour le moment, d'envoyer des troupes supplémentaires. Plus de 1 000 hommes y sont présents. Les Européens n'ont pas forcément fourni le même effort. Vis-à-vis de ce pays, la réponse ne peut pas être que militaire. Il faut une approche globale consistant à améliorer la gouvernance, à trouver des institutions qui correspondent au pays.