L’affaire UIMM, le syndicat patronal de la métallurgie fait un peu moins la une de l’actualité. On sait simplement que Denis Gautier SAUVAGNAC est mis en examen et qu’une enquête est désormais en cours.Volontairement ( ?) ou involontairement les médias se focalisent sur les versements occultes supposés envers certains syndicats. C’est négliger de parler de l’autre face de l’UIMM.J’ai déjà parlé de cette affaire UIMM dans deux articles :http://didier-hacquart.over-blog.com/article-13373130.htmlhttp://didier-hacquart.over-blog.com/article-14054558.htmlDans libération du 31 janvier, Joseph Pinard, historien revient sur l’histoire de l’UIMM, et complète les informations déjà données pour mieux comprendre ce qu’est réellement l’UIMM, et les relations entre le patronat et le pouvoirDH
L'UIMM, l'enquête qui va à droite (*)"Des preuves existent de l'implication de l'UIMM dans certaines campagnes politiques. C'est un fait historique, explique Joseph Pinard, agrégé d'histoire, ancien député (PS), qui rappelle le soutien des industriels de la métallurgie aux réseaux de l'Institut d'histoire sociale et leurs connexions politiques. La prudence et la lenteur de l'enquête sur les fonds en liquide de l’Union des industries métallurgiques et minières s'explique aussi par ces arrière-plans politiques. Comme le rappelle Joseph Pinard, Hervé Novelli, l'actuel secrétaire d'état aux entreprises, était lui même chargé de mission à la chambre syndicale de la sidérurgie de 1976 à 1986.
Joseph Pinard. «Des dizaines de millions d’euros en liquide sortis de l’UIMM, on sait encore peu de choses. Mais le doute a été bien vite jeté sur les syndicats. Je m’étonne que rien n’ait été signalé par les médias sur les largesses passées du syndicat patronal. Des preuves existent pourtant de son implication dans certaines campagnes politiques. C’est un fait historique. Une tradition ancienne. L’ancien président de l’UIMM, Pierre Guillen a évoqué les “dépenses de rayonnement” destinées à des bureaux d’études. En 1973, le journal l’Unité avait révélé qu’à l’occasion des élections législatives, deux millions d’affiches et trois millions d’autocollants “anti-programme commun” de la gauche avaient été financés par le syndicat patronal de la métallurgie. En 1974, c’est un faux numéro de France Matin imprimé à trois millions d’exemplaires qui annonce le rationnement qu’appliquera François Mitterrand s’il arrive au pouvoir. A l’époque, ces publications sont pour certaines conçues au siège de l’UIMM. Leur directeur de publication, Claude Harmel, n’est pas un inconnu des historiens. Il est l’un des piliers de l’Institut d’Histoire Sociale, aujourd’hui à Nanterre.
Une véritable enquête sur l’UIMM ne saurait faire l’impasse sur cet institut – par ailleurs détenteur d’importants fonds d’archives sur l’histoire syndicale. Dès l’après-guerre, la fraction dure du patronat en particulier dans la métallurgie y joue un rôle en soutenant à sa tête d’anciens collaborateurs, condamnés à la libération : Georges Albertini, ex-bras droit de Marcel Déat au Rassemblement national Populaire, et Claude Harmel, ancien cadre de ce parti pro-nazi. »«Alors qu’en 1943, il s’en prenait par écrit aux “cervelles talmudiques”, Harmel se reconvertit dans le combat anticommuniste de la guerre froide dès 1949. Il fonde l’Association pour la liberté économique et le progrès social (Aleps), grâce à des fonds patronaux, et l’institut supérieur du travail (Ist) pour former les cadres d’entreprise à l’action antisyndicale. Le 12 décembre 2006, l’anniversaire des quarante ans de l’Aleps a été célébré dans les locaux de l’UIMM à Neuilly, en présence d’Alain Madelin, ancien ministre, et d’Hervé Novelli, alors député, mais aujourd’hui secrétaire d’Etat chargé des entreprises. Dans le compte rendu officiel de cet événement, l’on apprend que MM Madelin et Novelli, heureux de leur “long compagnonnage” avec l’Aleps ont été conquis par Claude Harmel qu’ils considèrent comme “leur père spirituel”. Il est vrai qu’Harmel, l’ancien pro-nazi, avait été choisi par les Presses Universitaires de France pour rédiger leur Que sais-je sur la CGT !
Ce compagnonnage de Novelli avec l’Institut d’histoire sociale, que la lettre de Magazine Hebdo appelait “la principale centrale anticommuniste”, remonte aux années soixante dix, lorsque ces anciens collaborateurs ont attiré et recyclé des militants du groupuscule Occident. C’était un sas, une pouponnière. Le ministre, lui, s’est seulement souvenu d’avoir assuré la permanence de la bibliothèque de l’organisme. Il en avait aussi animé la commission “nationalisations” en 1983. De 1976 à 1986, Novelli était surtout chargé de mission à la chambre syndicale de la sidérurgie. Loin de financer les syndicats, ces réseaux les combattent. Il faut souligner le poids de leur lobbying en faveur du détricotage du droit du travail. A l’anniversaire de l’Aleps, un élu a prétendu représenter cent cinquante députés.
“Pourquoi les syndicalistes français, ces nabots du monde occidental, peuvent-ils terroriser nos élus au point de mettre la France à leur merci” s’indignait Bernard Zimmern, le président de l’Aleps, auteur de la dictature des syndicats (2003). Tandis qu’Hervé Novelli le félicitait “d’oser briser la loi du silence”. Zimmern est aussi trésorier fondateur de Contribuables et associés, un mouvement prompt à dénoncer “la mafia des syndicats”. Espérons que l’enquête révélera celle de l’UIMM. »
Recueilli par KARL LASKE(*) http://contrejournal.blogs.liberation.fr/mon_weblog/2008/01/luimm-lenqute-q.html